« Gueule’s of myself & Collection Jeanne Giraud » 15 Jean-Luc Giraud

Jean-Luc et Jeanne Giraud

Absolument vaillant tous les matins, Calme Orphelin, On a volé une heure d’or,
La soeur aîné de Madame de Scudéry, Un jour j’étais cigare, C’est pas moi c’est
ma soeur, Hommage à Monsieur des Esseintes, La nuit n’est pas comme le jour
etc, Le vaillant supporter de rien du tout…Voici quelques titres des oeuvres de
l’exposition « Gueules of Myself » de Jean-Luc Giraud.

À l’huile, au crayon, à la cire, à l’aide de l’outil informatique, au gré de toutes ces
techniques que Giraud manie en virtuose – c’est en effet époustouflant. Autant de
portraits de…de qui, au juste ? De Jean-Luc Giraud ? de la gueule de son double au
lever le matin à 9 heures, réveillé par sa compagne ? de ses avatars en littérature ?
de son idéal du moi ou l’inverse ? Une série de portraits qui représentent l’artiste,
ça s’appelle des « Autoportraits ». En ce qui concerne l’oeuvre de Giraud, on est
gêné aux entournures. Son travail, en effet est bien au-delà du genre, on dira
même qu’il le fait exploser dans une tentative absolument réussie et absolument
réjouissante de se séparer de sa propre image. Oui,oui, parfaitement, de se casser
la gueule à dessein. Pourquoi faire ? Pour rire et pour pleurer, pour rêver, pour
de rire, pour de faux. De se déchirer l’ego, de s’auto-piétiner le bulbe du narcisse
dans une rage joyeuse, libératrice. Mais enfin pourquoi faire ? Pour aller jusqu’à
l’âme, pour la rendre visible dans tous ses états d’être, dans tous ses états d’âmes,
pour révéler la tête qu’on a quand on se trouve en proie aux humeurs, aux orages
et aux béatitudes intérieures, comme tout le monde. Ce travail est extraordinaire
à plusieurs titres. D’abord parce que ça marche. Quand on se trouve là, devant les
« Gueule’s of myself », face à cet exercice de variations de soi qui s’affranchit de
l’image, pulvérise la question du reflet, fracasse le miroir, quelque chose apparaît,
et soulage celui qui regarde. La distance de soi à soi que réussit à prendre Giraud à
un effet cathartique : on est content de cette liberté prise qui nous montre l’au-delà
des miroirs avec tendresse, avec humour, férocité, poésie. Oui, tu peux, tu peux
lâcher le souci de ta propre apparence et te dissoudre dans ce que jamais tu ne
pourras voir de toi-même quand tu t’échappes, quant tu te réveilles, quand tu dors,
quand tu t’inquiètes. Moi, le peintre, j’essaie de saisir cela, ce « voir » là quand je n’y
suis plus, cet état qui me change quand je m’oublie, pour te le montrer. Alors Giraud
n’est plus personne. Il est tout le monde, il nous rejoint, comme un grand frère en
humanité, tel Dario Fo métamorphosé en tigre quand il nous raconte l’histoire du
tigre. Mais pour quoi faire ? Que cherche l’artiste ? A se déposséder de lui-même,
à laisser tomber les guenilles de l’ego, façon bouddhiste ? Pourquoi pas, ça y ressemble.
Mais il y a plus. Il y a et ici chapeau bas ! La tentative de rendre visible
la présence à soi-même, flirt avec cette impossible saisie de son propre regard.
Flirt avec l’impossible saisie de la boîte à secrets, du désir, tel le furet…

                                                                                                                           / Isabelle Floc’h

Exposition du 15 février au 16 mars 2012
« G ueule’s of myself & Collection Jeanne Giraud »

  • Le Guérandais intrépide
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